Tout juste de l'autre côté de la frontière, au
Québec, une lutte cruciale qui mérite l'attention et l'appui des travailleurs
et des jeunes aux États-Unis est menée.
Depuis près de trois mois, des dizaines de milliers
d'étudiants des universités et des cégeps (collèges préuniversitaires et
techniques) boycottent leurs cours et tiennent des manifestations pour
s'opposer à la hausse des droits de scolarité universitaires de 75 pour cent
sur cinq ans du gouvernement libéral provincial.
Les étudiants manifestent dans les rues de Montréal
et d'autres villes du Québec pour défendre l'éducation publique. Nombreux sont
ceux qui parlent du mouvement en tant que « Printemps érable »,
faisant ainsi le lien entre leur lutte et les soulèvements révolutionnaires qui
ont pris place en Tunisie, en Égypte et dans d'autres pays arabes l'an dernier.
L'ordre politique établi a réagi par la répression
en rendant les manifestations illégales et en ayant recours aux policiers pour
terroriser les étudiants avec le poivre de Cayenne, les gaz lacrymogènes et la
matraque. Au même moment, les médias à travers la province et le Canada
accablent les étudiants de mépris, affirmant qu'ils doivent être désespérément
naïfs ou mentalement déséquilibrés pour croire qu'une éducation universitaire
devrait être un droit fondamental.
Les médias américains ont quant à eux censuré tous
les articles sur les manifestations de masse qui prennent place à seulement
quelques centaines de kilomètres au nord de New York City. La dernière chose
que souhaitent les médias et les politiciens de la grande entreprise aux
États-Unis est que les étudiants américains imitent leurs homologues canadiens
ou s'allient à eux dans une lutte commune pour la défense de leur avenir.
Le droit à l'éducation publique et postsecondaire
est sous attaque partout sur la planète. Depuis le krach financier de 2008, les
gouvernements capitalistes ont sabré les budgets, augmenté les tarifs et mis en
oeuvre des politiques de libre marché qui rendent l'éducation accessible à
seulement quelques privilégiés.
En Europe, où l'éducation universitaire était depuis
longtemps gratuite ou à bas prix, les étudiants du Royaume-Uni ont tenu tête à
la violence policière en 2010 pour s'opposer au triplement des frais de
scolarité. Il y a un an, les étudiants allemands et autrichiens manifestaient
et occupaient les salles de conférence pour s'opposer aux coupes budgétaires.
Au Chili, des centaines de milliers d'étudiants des universités et des écoles
secondaires livrent une lutte féroce pour défendre le droit à l'éducation.
Aux États-Unis, l'administration Obama mène un
assaut violent contre l'éducation publique et les enseignants. Les étudiants
universitaires sont victimes de coupes budgétaires, de hausses des frais de
scolarité et d'un niveau d'endettement écrasant. Même avec un diplôme, il
devient de plus en plus difficile de trouver un emploi, et encore plus
difficile de trouver un emploi qui permet de vivre. Un rapport publié récemment
indiquait que 50 pour cent de tous les universitaires récemment diplômés
étaient sans emploi ou sous-employés.
Chaque politicien capitaliste à travers le monde -
qu'il soit libéral, conservateur, du Parti Québécois ou du Nouveau Parti
démocratique au Canada; démocrate ou républicain aux États-Unis; ou socialiste
ou d'un parti conservateur en France - soutient qu'il n'y a pas d'argent pour
maintenir, et encore moins améliorer, l'éducation publique et les autres
services sociaux essentiels. C'est ce que ces politiciens affirment, dans un
contexte ou des trillions de dollars ont été trouvés pour sauver Wall Street et
les banques internationales, et financer des guerres sans fin au Moyen-Orient
et en Asie centrale.
Les avancées scientifiques et technologiques et la
mondialisation de la vie économique font qu'il est maintenant possible de
produire plus de richesses qu'à tout moment de l'histoire et de résoudre les
problèmes sociaux et environnementaux complexes auxquels fait face l'humanité.
Mais sous le capitalisme, la distribution rationnelle des ressources est
impossible, car toutes les décisions économiques sont subordonnées à la quête
du profit d'une toute petite minorité.
Le plus grand constat d'échec du système capitaliste
est qu'il condamne une génération entière de la jeunesse à un avenir
d'ignorance, de pauvreté et de guerre.
Le fait que l'ordre politique établi réagit aux
demandes des étudiants québécois par la violence policière et le mépris le plus
profond montre que rien ne peut être gagné en adressant des demandes au régime
en place et à ses représentants politiques
Un changement fondamental n'est possible qu'en
brisant l'emprise dictatoriale qu'exerce l'aristocratie financière sur la vie
économique et politique, et en procédant à la transformation totale de la
structure sociale. Pour y arriver, il faut se tourner vers les grandes masses de
travailleurs qui sont poussées à la lutte par les mêmes mesures d'austérité,
les mêmes attaques sur les emplois et les conditions de vie.
Partout où la lutte des étudiants québécois est
connue, il y a un immense sentiment de solidarité pour eux. Craignant que cette
lutte ne devienne l'étincelle d'un mouvement beaucoup plus grand de la classe
ouvrière, l'ordre politique établi déploie tous ses efforts pour isoler les
étudiants de la classe ouvrière. Pour développer leur lutte, les étudiants du
Québec doivent vaincre leur isolement et lutter pour mobiliser la classe
ouvrière, la seule force sociale capable de mener un changement
révolutionnaire.
Un tournant vers la classe ouvrière ne veut pas dire
d'appuyer les syndicats et les partis sociaux-démocrates comme le NPD, qui
trahissent les travailleurs et collaborent avec les grandes entreprises et les
gouvernements depuis des décennies. Les besoins et les aspirations des
travailleurs ne peuvent s'exprimer à travers ces organisations procapitalistes
et nationalistes qui sont dirigées par des carriéristes de la classe moyenne
aisée profondément hostiles à la classe ouvrière.
Un tournant vers la classe ouvrière signifie une
lutte politique pour libérer la classe ouvrière du fardeau de la politique
capitaliste et bâtir un mouvement politique de masse capable de lutter pour le
socialisme.
En tant que candidat du Parti de l'égalité
socialiste à l'élection présidentielle américaine de 2012, j'appelle à la
mobilisation de la classe ouvrière à travers l'Amérique du Nord contre le
démantèlement des services publics, contre toutes suppressions d'emploi et
contre toutes concessions.
La lutte pour défendre les droits sociaux les plus
élémentaires des travailleurs et de la jeunesse, y compris le droit à une
éducation et à une qualité de vie décentes pour tous, nécessite une lutte
politique pour mettre au pouvoir un gouvernement des travailleurs. Ce n'est
qu'en prenant le pouvoir politique que la classe ouvrière au Canada et aux
États-Unis pourra réorganiser la vie politique et économique sur des fondements
socialistes, en nationalisant les banques et la grande industrie et en basant
l'économie sur les besoins humains et non sur le profit.